Les Éditions Héloïse d'Ormesson ont décidé de publier Didier Jacob!
Pas seulement ici...
En librairies aussi!
Je m'étais bien juré de ne jamais publier de journalistes et encore moins de critiques littéraires...
J'ai cédé à la tentation!
Non, je ne me renie pas.
Simplement il n' y a que les cons qui ne changent pas d'avis (ce qui n'est pas une raison pour en changer tout le temps!) et comme je prétends ne pas être (trop) con...
Mais soyons clairs:
Didier n'est pas membre d'un jury, n'est pas éditeur ou salarié d'une maison d'édition.
Il est simplement bourré de talent et après une longue conversation avec la femme de ma vie nous avons pensé qu'il était dommage de priver plus longtemps le public des librairies (et les libraires) de tels bijoux!
Par ailleurs , il n'est pas exclu, que dans un soucis constant de "remuer" un peu les "choses", la publication de ses chroniques-critiques au moment des prix littéraires ne soit pas un véritable hasard...
Dans les quelques 150 chroniques publiées sur son blog quelques dizaines sont de l'ordre des critiques à l'époque bénie où les journalistes savaient de quoi et de qui ils parlaient.
Il s'agit donc de la réhabilitation de la critique impertinente, intelligente et parfois méchante.
Mais qui aime bien châtie bien.
Héloïse, Didier et moi aimons la littérature et les écrivains. Il nous a donc semblé parfaitement normal de rendre à une critique littéraire digne de ce nom le lieu qui lui revient de droit:
le livre!
Nous espérons que cette initiative ne décevra pas ceux qui pensent que seuls les génies méconnus sont des vrais génies!
Enfin et pour que cela soit bien clair, il n' y a aucun échange du type "je te publie /tu parles de mes bouquins".
Il est donc fort probable , et quelle qu'en soit mon envie que je ne publierais plus les chroniques de Didier sur ce blog avant la sortie de son livre.
Deux options: aller les lire sur son blog et/ou attendre la sortie du livre!
Très bonne lecture et ce n'est pas un hasard si j'ai choisi celle qui suit pour vous annoncer cela!
06 mars 2008
Petite promenade en méchanceté littéraire
Vous m’en avez souvent fait le reproche : t’y vas trop fort, mon grand. C’est pas un blog, c’est un ulcère. Oh, je ne vous donne pas tort. Je me soigne, figurez-vous. Le soir, je ne m’endors jamais sans m’être plongé dans un vieux Max Gallo (difficile, au rythme où il publie, de tomber sur le dernier de toute façon). Eh bien, voyez, je prends moins de rougeurs. Oui, j’y crois, moi, à la médecine douce. Attention, ça ne marche pas à tous les coups. Attali, par exemple, rien à faire. Ecarlate, je deviens. Tiens, pas plus tard que cette semaine, sa chronique de l’Express intitulée « Nourrir le monde ». Si, après avoir révolutionné les chauffeurs de taxis, il nous met à dos tous les affamés de la Terre !
Rien de mieux en tout cas, pour guérir ses allergies, que d’écouter les écrivains s’empailler à longueur de siècles. Mettez la littérature française dans une bibliothèque, ça devient les alcooliques anonymes. Les méchants célèbres, on devrait appeler ça. L’endroit idéal, en tout cas, si vous essayez de vous débarrasser de ce vilain défaut. Tous ces écrivains qui n’ont jamais cessé de se haïr et qui, sur les rayonnages, semblent rassemblés pour en parler. Premier de cordée ? Saint-Simon, langue de pute number one.
Je vous accorde qu'être méchant n’a jamais remplacé le talent. Mais il faut reconnaître que ça aide. Cette phrase, par exemple, saisie au vol dans une petite anthologie du mauvais esprit (ça vient de paraître au Rocher, sous la direction de Eric Momus) : « J’ai un œil qui dit Zola à l’autre» (Maupassant). Le livre s’appelle « Je hais les écrivains », et c’est une sorte de guide Petitrenaud du règlement de compte : on y trouve quelques uns des plus beaux assassinats de l’histoire de la criminalité intellectuelle. Ici, toutes les armes sont permises ; souhaitées même. Montherlant poignarde Claudel (« Claudel, c’est du music-hall pour archevêque »). Claudel éviscère Gide (« Il se figure qu’il est simple parce qu’il est plat et qu’il est classique parce qu’il est blafard. C’est un clair de lune sur un dépôt de mendicité »). Et Courteline revolvérise Chateaubriand (« C’est démodé, cela, mon cher Monsieur ; ça ne s’admet plus qu’avec des pommes de terre autour »). Et comme boisson ?
L’histoire de la littérature, c’est 14-18 depuis Gutenberg : une vraie boucherie. A commencer par Morand, le saint patron des hargneux chics : «Prodigieuse existence que celle de Cocteau : à sauter dans tous les trains en marche depuis 1906, on comprend que le cœur ait cédé. » Arletty lui renvoya d’ailleurs la monnaie de sa pièce de la plus piquante manière : « Par les yeux, il était plus chinois que Mao, et il avait les jambes tellement arquées qu’on cherchait le cheval partout. »
Une maladie ? Probablement. La seule, en tout cas, dont il est bon de ne jamais guérir. Et puis, quand vous en avez assez de baigner dans le sirop de glucose que tout le monde sirote actuellement, vous pouvez toujours prendre des leçons chez les vieux maîtres. Je confesse une tendresse particulière pour Barbey d’Aurevilly. Vous souvenez-vous du recueil de chroniques que Michel Lécureur, il y a quelques années (1999), avait publié aux Belles Lettres ? Un régal. Son Flaubert notamment. « Si Flaubert a le bonheur de n’être pas un esprit facile, il n’a nullement celui d’être un esprit fécond. Non, c’est un homme à pensées rares qui, quand il en a une, la cuit et la recuit, et non point dans son jus ; car elle n’en a pas. C’est un esprit de sécheresse supérieure parmi les Secs, une intelligence toute en surface, n’ayant ni sentiment, ni passion, ni enthousiasme, ni idéal, ni aperçu, ni réflexion, ni profondeur (…) »
Encore, c’est Flaubert qu'il assaisonnait. Imaginez Barbey aujourd’hui, dépeçant Florian Zeller ! Barbey était méchant mais, au contraire des Goncourt, il n’était pas aigre. N’est-ce pas ce qui l’a fait si joliment vieillir ? Barbey d’Aurevilly, on s’y étend comme sur un drap frais, repassé de neuf, par jour d'heureux printemps. Alors que, si vous piochez un cornichon chez les Goncourt, vous ne mâchez que du moisi, vous ne sentez que le vinaigre.
Il faut voir, du reste, comment ils lui règlent son compte, au petit Jules : «Barbey d’Aurevilly, un critique épateur de bourgeois et dont les éreintements ou les magnificats semblent tirés au hasard dans un chapeau ; un romancier manquant absolument du sens de la réalité, un romantique arriéré, (…) dont la célébrité a été surtout faite par son costume de faraud imbécile, le mauvais goût de ses cravates à galons d’or, ses pantalons gris perle à bandes noires, ses redingotes à gigots, ses gants crispins, le carnaval enfin qu’il promenait toute l’année dans les rues sur sa personne» (24 avril 1889).
Les nouvelles générations doivent-elles toujours régler leur compte aux précédentes ? Baudelaire sur Hugo : «Hugo, sacerdoce, a toujours le front penché – trop penché pour rien voir, excepté son nombril. » Et, de même, Flaubert sur Lamartine : « Un esprit eunuque, la couille lui manque, il n’a jamais pissé que de l’eau claire. » Halte au feu ! Hissez le drapeau blanc ! Mais non, il faut toujours qu’il y ait des tireurs embusqués, comme Léon Daudet (à propos de Théophile Gautier) : «C’est une huître dans une perle ». Gautier qui fut également célébré par Saint-Beuve : « Les articles de Théophile Gautier sur la peinture sentent toute la cuisine et, pour ainsi dire, tout le graillon de l’art. »
Voyez, déjà, on se sent mieux. On a presque envie d’embrasser sur la bouche le plus mauvais écrivain du monde. Allez, une dernière vacherie pour la route ? Cette phrase de l’Américain Robert Benchley, dont je me dis qu’elle aurait pu s’appliquer à tant de nos chers contemporains : « Il m’a fallu quinze ans pour découvrir que je n’avais aucun talent d’écrivain, mais je n’ai pas pu renoncer car j’étais devenu trop célèbre. » Vous pensez à quelqu’un en particulier ? Ils sont si nombreux dans ce cas de figure. Voyons, ça pourrait être lui. Ou lui. Ou qui encore ? Lui ?
Le sujet est très bon, les bons mots aussi mais cela m'attriste terriblement. La condition humaine... Flaubert sur Lamartine : "Un esprit eunuque, la couille lui manque, il n’a jamais pissé que de l’eau claire"
C'est amusant, bien écrit, mais cela signifie que si Flaubert eût été éditeur il n'aurait pas publié Lamartine ce qui aurait été un trou dans l'univers poétique français.
Rédigé par : Pétale | 16 mars 2008 à 13:54
Je me promène sur les allées des blogs littéraires de liens en liens, on découvre et hume quelques perles.
Pour les rêveurs comme moi, qui n’aspirent qu’a publier un jour, c’est trouver un réconfort pour oser
Oser envoyer ses tripes par la poste, il faut pouvoir
J’ai écris le mot fin il y a un mois et aujourd’hui …………………..
Je reviendrai, je cherche un coup de cœur.
Amicalement
patrick
Rédigé par : patrick | 15 mars 2008 à 11:11
@ foisdenous,
c'est pas gentil d'oublier Jean d'Ormesson!
Bonne journée quand même!
Et sans rancune...
P.S: Isabelle Alonso ni aucun autre des auteurs cités n'a la moindre influence dans le milieu littéraire c'est que je voulais dire en parlant de ne jamais publier de journalistes.
Rédigé par : Gillou le Fou | 15 mars 2008 à 10:40
"Je m'étais bien juré de ne jamais publier de journalistes" Ah ah ah!!!!
Et Tatiana de Rosnay? Et Isabelle Alonso? Et Lionel Froissart? Viviane Chocas?
Rédigé par : foustoidenous | 14 mars 2008 à 16:30
Quelle bonne nouvelle !
Je patienterai aussi.
Il a l'air charmant en plus... (en plus d'être modeste, intelligent et drole, bien sur !...)
( http://www.canalacademie.com/Rebut-de-presse.html )
Rédigé par : ecaterina | 11 mars 2008 à 10:42
Trèstrèstrès bonne initiative pour l'initiation à la critique positive.
Rédigé par : martingrall | 11 mars 2008 à 09:32
Ça paraît prometteur, on va patienter, donc...
Rédigé par : Loïs de Murphy | 10 mars 2008 à 22:00