À la lecture du rapport fourre tout de Jacques ATTALI, il semblerait qu'en plus d'être un formidablement drôle critique littéraire Didier Jacob, un des hommes dont j'aimerais posséder le talent, soit en plus un vrai visionnaire.
Car écrire ce papier le 20 décembre avant que l'on ne connaisse la teneur dudit rapport cela relève au mieux du génie et au pire de la boule de cristal qui fonctionne!
On ne va pas s'étendre plus longtemps sur le rapport qui n'a d'autre intérêt que celui de démontrer que J.Attali s'il n'a pas le sens des affaires pour les autres l'a pour lui.
En effet la publication des "300 décisions pour la France" a lieu chez XO éditions uniquement parce que l'excellent et respecté Bernard Fixot a eu le bon goût de lui donner plus de droits d'auteur que les autres...
Autres qui n'ont pas jugé bon de donner des droits à quelqu'un qui n'avait écrit que la préface et la synthèse (dans le meilleur des cas) du rapport qui porte son nom!
Désolé une fois de plus que ce soit sur un coreligionnaire sépharade qu'il faille taper!
Mais après tout je fais comme lui: charité bien ordonnée commence par soi-même!
20 décembre 2007
Un conte de Noël : Attali Baba et les quarante douleurs
Il était une fois, il y a bien longtemps, un roi machiavélique et son dévoué serviteur. Celui-ci se tenait dans l’ombre, auprès de son roi. Il se nommait Jacques Attali Baba. La plupart du temps, il prenait des notes : les verbatim. Par verbatim, on entendait les pensées profondes du roi. Ce dernier mourut, et l’époque prit le nom du roi défunt dans les manuels d’histoire : le mitterranderthalien.
Jacques Attali Baba commença de lire dans les yeux de l’avenir. Bientôt, des hommes l’écoutèrent et s’abonnèrent à l’Express où il tenait chronique, on les appelait les Attaliens. Leur gourou ne prévoyait l’avenir, cependant, qu’à trois siècles et plus. Et s’il lui arrivait de lire dans les yeux de l’année prochaine, c’est que le Journal du dimanche de cette semaine lui avait demandé son avis sur 2008 : une année de tous les cauchemars ou une année pire encore que 2007 qui avait déjà été une belle salope (sauf pour le clan Sarko qui s’éclatait dans les boutiques) ? Attali Baba condescendit à regarder dans les yeux d’un avenir sub-lointain (2008) : oui, 2008 serait l’année de tous les cauchemars, sauf pour les boutiques.
Le gourou Baba avait exercé plusieurs fonctions officielles au sein d’un royaume qu’on appelait alors la République. Il avait également écrit des livres. Souvent, c’était conjugué au futur (parfois au conditionnel). Les Attaliens guettaient les pensées du maître, qui s’exprimait avec les moyens du futur (les journaux, les livres, le JDD, le blog). Il s’exprimait beaucoup, car il pensait beaucoup. C’est logique. Sur son blog, il avait annoncé que l’homme de demain serait un Chinois vivant dans le futur. Et les Attaliens migrèrent en masse vers la Chine, car un Attalien ne pouvait se contenter de vivre en 2007-2008 mais en 3014 et quelques.
Selon Attali Baba, le centre du monde se déplaçait lentement mais sûrement, et les civilisations qui avaient dominé cesseraient un jour de dominer. Exemple type : les US. Pour les yankees, c’était le début de la fin. Il en voulait pour preuve l’histoire d’un ancien associé de Soros, Jim Rogers, un gestionnaire de fonds américains. Le gars venait, selon Attali Baba, d’annoncer « qu’il vendait sa résidence de Riverside Drive à New York, qu’il convertissait ses actifs en yuans chinois et déménageait en Chine, agissant, disait-il, comme ceux qui sont venus habiter à New York en 1907 ou à Londres en 1807. » Ce qui fascinait beaucoup Attali Baba, lequel continua cependant de vivre à Paris intra-ceinture.
Comme tous les grands penseurs, les sujets les plus divers l’intéressaient. Le temps, le travail, le non-temps, le non-travail. Le non-non-temps, qui est un temps retrouvé ? Le gourou était pur esprit, langage pour le langage. Il avait un avis sur tout, généralement des plus inquiétants, par exemple : « Nous risquons une crise de 1929. » Le futur pensait et Attali Baba prenait des notes : encore les verbatim. Comme l’avenir pensait en lui, le nouveau roi le nomma penseur semi-officiel du régime. Ca s’appelait : l’ouverture. Attali Baba était à la fois gourou des Attaliens et président de la commission sur la croissance. C’était réconfortant de savoir que quelqu’un pensait à la tête de l’Etat (alors que les autres étaient dans les boutiques). Quoiqu’il n’était pas si réconfortant que ça de savoir qu’Attali Baba nous mijotait « un programme global avec une vingtaine d’axes forts et plus de 200 mesures concrètes ». Plus tard, ces mesures concrètes feraient un conte de Noël : Attali Baba et les quarante douleurs.
Le gourou traînait pas mal de casseroles. Tout était dans Wikipédia : la mauvaise gestion supposée de la BERD, les rumeurs sur des « financements occultes » (« liés à l’Angolagate et à des connexions russes »). A en croire Wiki, Jacques Attali Baba avait eu « des déboires avec la justice russe. Selon les investigations menées en 2003 et 2004, il aurait perçu des honoraires équivalant à deux millions de dollars américains pour des services de consultant qui ne se sont jamais concrétisés – il s’agissait alors de redonner à la ville russe « un prestige international » alors qu’elle allait célébrer son bicentenaire : l’idée présentée était de créer une BERD eurasienne et une Ligue de la paix rassemblant certaines villes portuaires de la mer baltique. » La question qui préoccupait les Russes : mettrait-on du marbre partout, dans les locaux de la BERD eurasienne, comme dans ceux de la BERD normale décorés par Attali, ou se contenterait-on d’un bon vieux linoléum post-soviétique ?
Des Attaliens émirent des doutes sur les compétences de leur gourou : les films chinois et la bouffe chinoise allaient-ils vraiment supplanter l’Amérique des hamburgers et des films pleins de nanas sympas ? Les Attaliens espéraient secrètement que leur gourou se trompait. Attali Baba comprit qu’il devait aimer ses troupes pour se faire aimer d'elles. Il lança une belle idée dans le vent du futur : le polyamour (un peu comme le polycarbonate mais avec de l’amour dedans). C’était dans Match d’il y a quinze jours. « Le XXIème siècle sera celui de l’amour multiple, de la polyunion, de la polyfidélité ». C’était une belle idée, un peu terrifiante quand même sur le plan moral. « Si rien aujourd’hui n’interdit d’aimer plusieurs personnes successivement, rien n’interdira, un jour, d’aimer, comme ça se fait déjà en secret, plusieurs personnes simultanément. »
Le président était, justement, fort intéressé par cette question. Lui-même se consolait d’un amour sympa dans les bras d’un amour hyper-sympa. La chérie du roi (une chanteuse du Top 50 qui aimait les poètes anglais) n’avait-elle pas elle aussi tâté du polyamour ? Elle en était même la championne du monde, à ce qui se disait dans les milieux informés. Est-ce que « poly » suffisait dans son cas ? Elle était assurément plus « poly » que « mono ». Tout cela inquiétait Sa Majesté, qui avait mal digéré que son premier amour ait montré qu’elle n’était pas non plus hostile au polyamour.
Le roi avait lu le papier d’Attali Baba, dans Match, et surtout ce passage : « A l’avenir, les gens qui choisiront le modèle de l’amour multiple, de la polyunion, de la polyfidélité ne constitueront qu’une pointe avancée de l’humanité. » Il convoqua Baba et lui dit : « Mais je ne supporterais pas que Carla couche avec tout le monde ! » Attali Baba concentra dans une même pensée toute la puissance de son cerveau polypensant : « La France ne sera pas elle-même dans l’union avec l’autre, mais dans l’union avec soi comme étant elle-même autre. » Sarko bouillait. « Si elle me trompe, je bute le salopard, et elle avec. » Attali Baba, citant son article de Match : « On doit cela au XXème siècle : la généralisation du droit à l’amour condamne à mort le mariage monogame dont le triomphe historique n’était pas écrit à l’origine. » Le roi en eut assez. Il décida, pour s’en débarrasser, de confier une ambassade au gourou. « La Chine ? », demanda Attali Baba. « Non, la Polynésie ! »
Bonne année prochaine à tous. Tentez de survivre jusqu’au 3.
Attali, le visionnaire, avait-il prévu la mise en ligne sur Internet de son rapport? Si oui, son éditeur n'a-t-il pas là un manque à gagner?
Rédigé par : castor | 02 février 2008 à 18:40
Exceptionnel.Il fallut attendre. Le meilleur moment ce n'est jamais lorsque l'on monte l'escalier. Mais quelle Journée s'annonce, le ciel bleu, 24° soleil au compteur,... Chez Hegel, Léo a décapsulé l'enfouis, l'idée est le néant de l'incompétence qui, elle, est.
Rédigé par : martingrall | 30 janvier 2008 à 13:23
Bonne soirée !
Rédigé par : Tietie007 | 29 janvier 2008 à 20:43
Excellent ! Et comme disait Mitterrand, "Attali est le seul homme a avoir cent idées par jour, mais je suis le seul à savoir quelle est la bonne."
Rédigé par : Loïs de Murphy | 29 janvier 2008 à 19:05