Voici la fantastique histoire de la traduction à travers les ages.
Comme dirait l'autre : "quand il n' y en a plus , il y en a encore!"
Et maintenant (comme disait Madame..!) rions!
LA FABULEUSE HISTOIRE DE LA TRADUCTION À TRAVERS LES ÂGES
Une épopée oubliée
ou
oui, bon
“La langue est une chose trop sérieuse pour être confiée à des traducteurs”.
Georges Clemenceau
Préambule
Vous qui, comme moi, fréquentez les salons les plus en vue, avez sans doute dû répondre plus d’une fois à la question traquenard par excellence, généralement assénée avec un subtil mélange de mépris et de désintérêt discrètement affiché : « Et vous faites quoi, dans la vie ? »
Et là, je n’hésite jamais. « Traducteur, » que je leur réponds. Croyez-moi, ça leur en bouche en coin. Enfin, la plupart du temps, en réalité, ils ripostent par un : « Ah oui ? Et dans quelles langues ? » Sous-entendu, si vous ne traduisez qu’une seule langue, vous êtes un nain. Malheur à vous si, tombant dans le piège, vous vous laissez aller à dresser le catalogue somme toute modeste des idiomes que vous tentez vainement de maîtriser depuis une trentaine d’années : « Ben, euh… (démontrant déjà par là votre sens naturel de la repartie) anglais, … (rajoutez ici n’importe quelle autre langue que l’on apprend plus ou moins à partir de la quatrième) ». Et là, vous vous dites que, quand même, c’est pas tout le monde qui parle ces langues-là, hein ? Détrompez-vous, le nuisible qui vous a harponné a la ferme intention de vous prouver le contraire.
À ce moment-là, il va soit :
1. vous entreprendre dans une des langues que vous avez citées avec un accent du cru que vous n’avez jamais été foutu d’acquérir tout au long de votre vie ;
2. vous expliquer sans se fatiguer à vous regarder en face que lui, il parle le … (inscrivez ici n’importe quelle langue que l’on n’apprend absolument jamais à partir de la quatrième) ;
3. vous assurer qu’il connaît parfaitement Londres (ou Nouïorque) si par hasard c’est l’anglais votre première langue. Puis il embranchera directement sur l’option 1 mentionnée plus haut.
4. et enfin, le coup de grâce, il vous dira sans sourciller qu’il n’adore rien tant que traduire lui-même quelque œuvre bien sentie de tel ou tel auteur (au choix et pour n’en citer que quelques-uns : Shakespeare, Beckett, Mann, Schiller, Tolstoï, Dostoïevski, Kawabata, Obe, Eco, Buzatti, Cervantès, Garcia Lorca, tout ce qui pèse un peu, quoi) parce que ÇA LE DÉTEND !
Alors que vous, c’est votre boulot, et que pour vous détendre, eh bien, vous n’adorez rien tant que, par exemple, ne rien faire du tout, glandouiller mollement affaissé dans un fauteuil à contempler d’un œil vide les mornes exploits de tel ou tel héros de sitcom tout en ne pouvant vous empêcher de critiquer au passage le boulot du collègue qui a dû se taper la traduction des dialogues lamentables de cette daube sans nom.
Le monsieur du cocktail qui vous a d’ailleurs déjà tourné le dos pour aller arborer son génie face à une assistance un peu plus digne de l’admirer que vous, lui, votre façon de gagner votre pain quotidien, ça le détend…
On est peu de choses, allez. Il est un autre genre de coco auquel on a à faire quand on est traducteur et que l’on ose se hasarder hors de son trou, c’est celui qui se croit obligé de sortir l’inévitable phrase, la formule magique articulée par tout abruti qui a la joie de tomber sur un traducteur ou une traductrice en rase campagne. Donc, revenons à notre cocktail. Vous êtes là, encore tout meurtri par la rossée moralo-linguistique que vous a infligée le bonhomme précité, votre main moite embuant peu à peu votre flûte de champagne qui se réchauffe au fur et à mesure que votre honte croît et là, paf, la question :
- Et vous faites quoi, dans la vie ?
Des papillons battant follement de l’aile dans votre cage thoracique, muscles bandés face à l’adversité, vous vous retournez et vous retrouvez nez à nez avec un autre monsieur (il peut arriver que ce soit une dame), souvent plus âgé que le précédent.
- Euh … traducteur, faites-vous, méfiant.
Soudain, le regard de votre nouvel interlocuteur se voile, il semble propulsé vers des horizons lointains qu’il est le seul à avoir jamais explorés, et il vous lâche d’une voix rendue rauque par l’émotion :
- Aah, traduttore, non traditore !
Là, vous réagissez généralement en :
1. marmonnant un « eh ? » confus tout en cherchant désespérément la sortie du coin de l’œil ;
2. vous apercevant que ce qu’il vient de dire n’était pas articulé dans une des langues que vous avez apprises, et en cherchant par conséquent une échappatoire qui vous permettra de vous en tirer la tête haute plutôt que la queue basse. Bien souvent, cela vous contraint à revenir en 1 ;
3. vous souvenant de la langue en question, que vous aviez prise en option histoire de vous faire des points (au Bac, au DEUG ou à la belote, peu importe), sauf que vous ne savez absolument plus ce que veut dire la phrase qu’il a sortie, ce con, lequel con vous scrute désormais intensément en guettant votre réplique ;
4. comprenant parfaitement ce qu’il vient de dire, parce que la langue en question, vous la traduisez justement, ou encore parce que vous vous êtes tamponné suffisamment de latin pour la capter. Mais qu’est-ce que vous voulez répondre à une telle connerie ?
Il ne vous reste plus qu’à sourire avec un « haha ! » crispé tout en rêvant d’équarrir le crétin sur place. Sauf que si vous étiez capable de faire ça et de vous en tirer sans autre ennui avec la maréchaussée, vous ne seriez pas traducteur.
Mais qu’ont-ils donc tous avec la traduction, me direz-vous ? Tout simplement, ils rêvent d’être comme vous. Eh oui, ils sont jaloux. Rendez-vous compte un peu, vous exercez le plus beau métier du monde (j’entends d’ici grommeler les pompiers, les croque-morts, les ministres, les mercenaires, les sans-abri, les fondeurs, les derviches tourneurs-fraiseurs, les proctologues, les péripatéticiennes, les présidents de la République, les lanceurs de personnes verticalement défavorisées. Grommelez tant que vous voudrez, n’empêche que c’est vrai) !
Pourquoi la traduction est-elle le plus beau métier du monde ? Parce qu’elle est aussi le plus vieux (une fois de plus, merci aux pompiers, croque-morts, ministres, mercenaires, sans-abri, fondeurs, derviches tourneurs-fraiseurs, proctologues, péripatéticiennes, présidents de la République, lanceurs de personnes verticalement défavorisées de manifester leur désapprobation en silence, il y a des gens qui essaient de lire, ici).
Et quelle meilleure façon de vous le prouver que de vous entraîner à ma suite dans un fabuleux voyage aux origines de ce sacerdoce. Si après ça, vous n’êtes pas jaloux vous aussi, c’est juré, je ne foutrai plus les pieds dans un cocktail.
Rhaaaaaaa grillée au poteau ! Je suis déçue... A deux doigts d'aller acheter un Marc ou un Paolo... A la Fnouk en plus...
Rédigé par : Loïs de Murphy | 07 janvier 2008 à 11:06
Bonjour Gilles
Ah traducteur!
Ce n'est pas ce magnifique métier tellement sous-payé qu'une annonce récente (mentionnée pas Pierre Assouline et que j'avais relayé au site http://equilibreprecaire.wordpress.com/) proposait en pus quelques heures de ménage ?
Bonne année 2008 avec moins de casse-pieds dans les cocktails ;0)
Arf!
Zgur
Rédigé par : Zgur | 05 janvier 2008 à 14:19
Si c'est une ruse de guerre pour vous dispenser d'aller dans les cocktail, avons-nous le choix ?
Quant aux détendus de la traduction, rassurez-vous, la vantardise mâtinée de vérité approximative est un sport national.
Rédigé par : Loïs de Murphy | 04 janvier 2008 à 17:59