"On ira où tu voudras,
Quand tu voudras,
Et l'on s'aimera encore,
Lorsque l'amour sera mort,
Toute la vie sera pareille à ce matin,
Aux couleurs de l'été indien..."
Voilà ce que je me disais en rentrant de déjeuner avec la Très Belle Héloïse ;
le problème c'est que c'est difficile de savoir où l'on va dans ce métier...
Prenez les listes de meilleures ventes...
Comment ?
Pas cette semaine ?
D'accord, j'attends jeudi prochain et on verra...
... en attendant ce jour...
Je regarde autour de moi, dans ce bureau d'une extrême clarté, entouré des photos de TBH et je me dis que tous les aspects de cette activité sont absolument passionnants...
Je viens de passer une petite heure avec une dame de la médecine du travail qui voulait vérifier si l'édition était synonyme d'esclavage... Elle est repartie déçue...
Un peu avant, j'étais avec un journaliste ami, qui est aussi un ami journaliste (c'est assez rare chez moi - d'avoir des amis et qu'ils soient journalistes, mais aussi d'avoir des amis touts courts - non pas tous courts, tout court) et nous avons devisé gaiement de la rentrée littéraire...
Vous voulez que je vous dise quelque chose d'un peu secret ? C'est la rentrée !
Je sais, vous allez dire que je suis complètement fou (certes vous n'avez pas tort mais ce n'est pas le propos !), que tout le monde le sait...
Faux ! Personne, enfin presque, ne sait que les livres... rentrent !
Oui, vous avez bien lu : LES LIVRES RENTRENT !
Ce qui signifie qu'ils reviennent déjà de chez les libraires où ils étaient allés se promener quand on leur avait fait croire qu'ils allaient... sortir !
Car aujourd'hui, tous ceux qui ne sont pas sortis de leur terrible anonymat ont assez d'essence pour faire la route dans l'autre sens... Ils retournent à la maison ! Et pour eux, la maison ça s'appelle le pilon (c'est du poulet... !) c'est pour cela que Mr N. passe ses vacances sur la dune du... Pilon ! A côté d'Arcacha...
Bref, pour ceux qui lisent le Nouvel Observateur (comme dirait Coluche "rien que le nom m'amuse... !") vous êtes en droit de vous interroger sur le fait de savoir si ce n'est pas l'article de Mr G. qui m'a inspiré ; sérieusement vous êtes en droit de le faire. Et moi je suis en droit de répondre à votre légitime interrogation, et je vais le faire...
Je respire...
Absolument pas !
Par contre, lui, je ne suis pas sûr que la dernière phrase de son papier ne soit pas inspirée de notre opération "Passe-Livre", je ne suis pas sûr...
D'autant que c'est probablement un des rares journaux à n'avoir pas parlé de cette petite chose ; mais pas de paranoïa, ni de gonflage de tête intempestif...
Non, je suis mauvaise langue ; Mr G. n'a pas pu s'inspirer de cette opération puisque le journal dont il dirige la rubrique culture n'a pas une seule fois (pardon, si 2 fois... !) parlé d'un de nos livres.
Comment avoir l'outrecuidance alors d'imaginer qu'il termine son papier en pensant à nous par cette phrase :
"Faites passer"...
Non franchement, l'imagination, parfois, ça me joue des tours...
Donc revenons à nos pilons !
La mortalité infantile dans l'édition est très largement supérieure à ce qu'elle est dans les pays en voie de développement... Non, je n'ai pas dit que l'Édition était sous-développée... Pas encore !
Donc les livres sortent prendre l'air en août et rentre prendre du pilon en septembre...
Question : pourquoi sortir en août ?
Réponse : comment je fais Coco pour les prix littéraires si je ne sors pas en août ?
" Parce que le but de la rentrée c'est d'avoir un prix... Pour sortir dans les meilleures ventes... Parce que bon, la littérature ça va trois minutes mais enfin quand même, quoi ! Je dirige une entreprise, moi ! "
Effectivement, vu comme cela, lorsque l'on met en parallèle des vraies vies, de vrais gens, avec des vies de livres... Mais à bien y réfléchir, c'est pas tellement déconnecté tout ça, même si c'est tellement déconnant (le barbare - je ne peux pas m'en empêcher, allez vous plaindre auprès de Pierre Pelot - mon phare, pardon mon frère d'armes, de larmes et d'amitié et de livres et de vie et tout ça et puis encore le reste en plus qui n'appartient qu'à nous et dont nous ne sommes ni contents, ni pas contents, que c'est juste comme ça, même quand c'est injuste parce que parfois ça l'est - donc allez vous plaindre auprès de mon arbre où j'édite heureux), parce que les livres qui se vendent, ils font vivre des gens, des vrais, pas seulement des auteurs (si ce sont aussi des vrais gens mais pas exactement comme les autres... Enfin pas tous... Mais je vous parlerai des auteurs un autre jour... Si vous voulez bien), ils font vivre des libraires, des commerciaux, des journaux et tellement d'autres personnes directement ou indirectement.
Mais qu'on se le dise, la mort du livre ce n'est pas le pilon !
C'est son absence de visibilité !
LA MORT DU LIVRE C'EST TROP DE LIVRES !
ET QUI C'EST QUI PUBLIE TROP DE LIVRES ?
C'EST PAS NOUS, C'EST PAS NOUS...
QUI C'EST LE GRAND MÉCHANT LOUP ?
C'EST PAS NOUS, C'EST PAS NOUS !
Parce que la mort du livre, elle est due à ceux qui veulent en faire vivre trop !
Contrairement aux idées reçues, ce ne sont pas les petites maisons d'édition qui encombrent les rayons des librairies, ce sont les grosses maisons !
Qui ont besoin de faire du chiffre d'affaires quel qu'il soit, sain ou pas, pour faire vivre leurs structures pléthoriques qui ont des trains de vie pharaoniques !
Il est là le vrai problème de la vie des livres : dans la surproduction, et surtout dans la surproduction de livres tellement ineptes qu'ils discréditent les vrais livres (ceux publiés par l'ami Éric Naulleau à L'Esprit des Péninsules, ou ceux publiés par Sabine Wespieser, comme ceux publiés - même si ce n'est pas toujours mon genre - par Marion Mazauric au Diable Vauvert ou encore Olivier Frébourg aux Équateurs) ça ce sont des vrais livres qui méritent qu'on leur laisse de l'oxygène, de la place et qu'on en parle !
Plutôt que de nous emmerder avec les états d'âme de C.A. (elle fait pas tellement de C.A., C.A...), ou le Nième opus de la souris grise anthropophage, ou encore le marketing dément du décoiffé (de l'intérieur comme de l'extérieur ! Finalement, non. Il est beaucoup trop coiffé à l'intérieur, si ce n'était pas le cas, son business plan ne serait pas aussi bon... Il n'a même pas le mérite de la folie, le pauvre garçon !). J'aimerais que l'on nous parle de ces auteurs qui mettent leur âme et leurs tripes à la création, certes imparfaite, de textes qui vivent, qui vibrent, qui donnent à penser, qui sont bien écrits et ouverts sur le monde plutôt que tous ces abrutis auto-centrés sur leur nombril dont tout le monde se fout !
Donc, nous avons le choix entre, dans le meilleur des cas, du pas très bon et dans le pire, du très, très mauvais...
Et on voudrait que le livre ne meurt pas...
On voudrait que les gens lisent...
Merci, à vous lecteurs (de livres, pas de moi!) de ne pas tomber dans le panneau et d'avoir encore un peu de libre-arbitre pour lire Alain Mabanckou, Agnès Marietta, Stéphanie Janicot et tant d'autres qui sont plus discrets que ces mondano-littérateurs et ont infiniment plus de talent, chacun d'entre eux, que tous les autres réunis !
Enfin, pour finir, oui je sais vous commenciez à trouver ça long... Pour finir donc, faites-vous plaisir et lisez "Rhésus" d'Héléna Marienske publié chez P.O.L. Elle est pétrie de talent, c'est formidablement écrit et en plus elle est belle, mais belle... !
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