L'entretien accordé par François Nourissier au Figaro
Mais avant l'excellent papier de 20 Minutes sur le Goncourt 2007...
Et le Goncourt 2007 est attribué à...
C'est Gilles Leroy qui vient de recevoir le Goncourt 2007 pour «Alabama song» (Mercure de France), un livre qui raconte à la première personne la vie de Zelda Sayre, la femme de l'auteur de Gatsby le Magnifique, Francis Scott Fitzgerald.
«Ce prix, c'est aussi pour elle, qui a été sacrifiée, pas reconnue à son juste talent», a déclaré Gilles Leroy aux journalistes, quelques minutes après l'annonce du prix Goncourt.
>> Le portrait du lauréat en cliquant ici...
Olivier Adam, avec «A l'abri de rien» (L'Olivier), et Philippe Claudel, pour «Le rapport de Brodeck» (Stock), ont eu beau figurer parmi les meilleures ventes de l'automne, ils sont restés sur le carreau. Ainsi que Clara Dupont-Monod avec «La passion selon Juette» (Grasset) ou Michèle Lesbre avec «Le canapé rouge» (Sabine Wespieser), auteurs plus confidentiels.
Ces cinq noms avaient filé de bouche en bouche, suscitant des pronostics contradictoires parmi la soixantaine de journalistes et de photographes amassés devant le restaurant Drouant, à Paris. C'est là qu'à 13 heures, le jury a annoncé le nom de l’heureux élu.
Mauvais pronostics
Olivier Adam, déjà connu pour son livre «Falaises» et via le scénario du film «Je vais bien, ne t’en fais pas», était «le grand favori, a dit Baptise Liger, journaliste littéraire pour L'Express et Teknicart. Mais on pensait aussi que cela aurait pu être une femme, et donc, Clara Dupont-Monod.»
«Le problème de Clara Dupont-Monod, c'est qu'elle est à peine sortie de l'oeuf, a surrenchéri cette autre journaliste. Elle a été repéré très récemment par le prix des lecteurs de la Fnac.» Or souvent, le prix Goncourt sert à «récompenser le livre qu'on a laissé passer», a-t-elle encore expliqué. Autrement dit, comme Olivier Adam n'a pas été primé pour «Falaises», il aurait pu être «rattrapé» avec un prix pour son nouveau livre, «A l'abri de rien».
Encore raté.
Gallimard, grand gagnant
Toujours est-il que Gallimard fait ainsi carton plein. Jonathan Littell, le précédent Goncourt, était édité par la maison. Daniel Pennac, prix Renaudot 2007, est aussi édité par la maison. Quant à Gilles Leroy, il est chez Mercure de France, distribué par Gallimard.
François Nourissier :
«Je m'en vais en douceur»
Propos recueillis par Étienne de Montety
09/01/2008 | Mise à jour : 14:25 | Commentaires 1
En octobre dernier, le jury du Goncourt a posé pour Le Figaro. De gauche à droite : Didier Decoin, Jorge Semprun, François Nourissier, Edmonde Charles-Roux, Daniel Boulanger, Françoise Chandernagor, Robert Sabatier et Bernard Pivot (absents Françoise Mallet-Joris et Michel Tournier). Crédits photo : Le Figaro
L'ancien président du Goncourt qui a décidé, selon ses propres termes, de «s'éloigner» nous a accordé un entretien.
Ces jours-ci, François Nourissier ne quitte guère son domicile parisien. Sa décision de démissioner du jury, il l'a prise «le cœur lourd» mais accepte sans nostalgie d'évoquer ses trente ans de juré Goncourt : «Maintenant tout cela, c'est derrière moi.»
LE FIGARO. Pourquoi quittez-vous l'académie Goncourt ?
François NOURISSIER. Je m'en vais en douceur. J'ai été élu à l'académie Goncourt en 1977, en ai été secrétaire général puis président. Tout ceci représente une activité considérable. Aujourd'hui, pour des raisons personnelles, liées à ma santé et à des épreuves récentes, le moment semble venu de m'en aller. Les discussions au sein de l'académie demandent une force que je n'ai plus.
Comment qualifieriez-vous votre action au sein de ce groupe ?
Quand j'ai été président de l'académie, j'ai constaté que l'assiduité à lire avait diminué. Je n'ai donc cessé d'insuffler deux principes à mes amis : le premier c'est «Lisez» et le second «Cohabitez». Je regrette en effet qu'il n'y ait pas eu davantage d'amitié entre nous, ou du moins de complicité, comme il y en avait jadis entre Lanoux, Roblès et Bazin, par exemple.
Qu'est-ce qui a changé pendant toutes ces années ? Une polarisation médiatique sur le verdict ?
Elle a toujours existé. Je suis bien placé pour le savoir. En 1968, Louis Aragon a démissionné du jury après avoir échoué à me faire attribuer le prix. Peut-être qu'à l'époque, la véhémence était interne. Maintenant elle s'étend jusque dans la presse. Cependant, il me semble que l'arrivée de Bernard Pivot correspond à une date charnière. C'est un juré exemplaire qui lit beaucoup, réfléchit avant de parler, dit ce qu'il pense. On m'a beaucoup opposé au moment de son élection qu'il n'était pas «écrivain», comme c'est l'usage pour être admis à l'académie, mais il a eu et conserve une influence sur la littérature contemporaine. C'est pour moi l'essentiel.
Quel est le juré Goncourt qui vous a le plus marqué ?
Je choisirai à dessein parmi les anciens en citant Hervé Bazin. Il ressemblait à un bourgeois du XVIe siècle, mâtiné de Louis XI. On cherchait les médailles sur le bonnet de feutre. Il était maniaque, étrange. Il réparait des meubles anciens, des tapisseries. C'était un homme des marges qui persistait à vivre dans la banlieue Est. Notre voisinage à l'académie Goncourt m'a passionné.
Et parmi les membres actuels ?
Je rends naturellement hommage à Edmonde Charles-Roux. Elle est mon amie depuis 1951, une amitié sans nuages si l'on excepte quelques légers différends politiques. Je l'admire pour son caractère. Arrivée à l'académie en 1983, elle a constamment bonifié l'institution. Depuis qu'elle la préside, elle se dépense beaucoup pour elle, voyage, la représente dans le monde.
Quel livre primé vous a donné le plus de satisfaction ?
Ingrid Caven de Jean-Jacques Schuhl. C'est un écrivain rare, du vrai gibier de littérature. Dans son livre passent la guerre, la persécution mais aussi l'humour, la maladie. Je ne le connaissais pas. J'ai lu son livre et peu à peu rallié des membres du jury à mon choix avant de l'imposer. Ses adversaires qualifiaient ce livre de «petit objet parisien». Quand on songe que l'auteur est un juif de Marseille affecté par la polio, le qualificatif fait sourire. L'autre roman est La Maîtresse de Brecht, de Jacques-Pierre Amette (en 2003, NDLR), un choix pur qui a suscité des réactions d'une grande violence, je ne sais pourquoi.
Un souvenir de votre rôle de président ?
J'ai fait élire Jorge Semprun en 1996, avant de m'aviser que notre règlement ne permettait pas d'accueillir des membres étrangers. J'ai donc passé un été à œuvrer, à tirer les sonnettes, jusqu'aux ministres, pour ajuster nos statuts à cette situation : on peut tout faire avec une institution, à condition de le faire avec douceur.
Avez-vous un regret ?
Celui de ne pas avoir pu imposer Michel Houellebecq. Je me souviens que peu après le prix (décerné à Paule Constant, NDLR), nous avions été reçus à l'Élysée. Le président Chirac avait alors fait une sortie audacieuse : «Mais Nourissier, Houellebecq, c'est un écrivain de fourré, de buisson, vous ne pouvez pas le défendre.» J'avais riposté en lui expliquant que ce n'était pas son rôle de prendre ainsi parti. À la fin du repas, il s'est levé. Je suis ostensiblement resté assis et après que le président eut porté un toast à la santé de l'académie Goncourt, je me suis levé à mon tour et j'ai trinqué «à Michel Houellebecq qui doit être un peu seul ces jours-ci».
Les hommes politiques s'intéressent donc au Goncourt ?
Mitterrand est venu deux fois déjeuner avec nous à sa demande. Quand Valéry Giscard d'Estaing fut à notre table, il a beaucoup parlé, avec assurance, notamment de modalités de la conversation au XVIIIe siècle. Je me souviens aussi d'un été où Dominique de Villepin était alors premier ministre. Je déjeunais régulièrement le samedi à Matignon. Il faisait campagne pour un roman, avec tant d'assiduité, que j'ai été obligé de l'avertir gentiment : «Si tu me parles toutes les semaines de ce livre, je ne viendrai plus.»
Comment voyez-vous l'avenir de l'académie Goncourt ?
Elle a connu des troubles, des pugilats, s'est fait durement attaquer et depuis cent quatre ans vit dans des conditions insensées. Tous les ans on prédit sa mort et tous les ans, le roman qu'elle couronne fait la une des journaux. L'académie Goncourt a au moins une qualité : elle fait vivre la littérature.
Il faut vraiment tout faire sur ce blog...
Comme c'est la Saint-Guillaume, que je viens d'être déplâtré et que je termine ma bronchite, voici une petite pour un ouvrage dont le sujet me paraît particulièrement intéressant...
(je précise que ce n'est même pas moi l'imprimeur, ce qui prouve à quel point je suis de bonne foie (??) en ce début d'année...
Play Girl
par Jérôme Dupuis
Avec Le Degré suprême de la tendresse, Héléna Marienské signe des pastiches virtuoses sur un sujet risqué, la fellation. Rencontre avec une agrégée qui n'a pas froid aux yeux.
Une folle rumeur courait le petit milieu des lettres parisiennes entre Noël et le jour de l'An: la romancière Héléna Marienské allait poser pour Playboy à l'occasion de la sortie de son recueil de pastiches, Le Degré suprême de la tendresse! Incrédule, on se risque à lui poser la question. Etincelant éclat de rire qui vaut démenti. «C'est moi qui ai fait croire à mon éditrice, Héloïse d'Ormesson, que nous allions poser toutes les deux! Non, en fait, Playboy va publier mon pastiche de Tallemant des Réaux, un chroniqueur du xviie siècle.» Ce qui est un tantinet plus austère...
Depuis son premier roman, paru en 2006, Rhésus (POL) - une fable dérangeante où un singe bonobo attisait l'ardeur sexuelle des pensionnaires d'une maison de retraite - Héléna Marienské est très attendue. Son nouvel Objet Littéraire Non Identifié, où il est abondamment question de fellation, pourrait bien faire sensation en ce début d'année. Imprévisible, cette agrégée de lettres peu inhibée est capable d'improviser une danse du ventre étourdissante devant le tout-Paris littéraire, pour célébrer le prix Wepler qui venait de lui être décerné, tout en cogitant à une thèse de doctorat sur un comédien de la troupe de Molière. A sa décharge, cette native de Béziers - son pseudonyme Marienské, nom tchèque de «Marienbad», lui vient de sa mère - a suivi ses études au lycée de Pézenas, où le jeune Molière fit ses débuts. C'est d'ailleurs le théâtre qui la sauvera d'un brutal accès de mutisme au milieu de sa khâgne à Henri-IV. «Je ne pouvais plus prononcer le moindre son, confie-t-elle. J'ai arrêté mes études et suis partie faire du théâtre à Londres. Parler en anglais m'a débloquée.»
«Il s'agit d'un livre politique, féministe»
Après avoir enseigné dans le 9-3, le 0-3 et le 4-3, notre pasticheuse s'est mise en disponibilité cette année. Elle vit désormais dans une maison perdue au bout d'un chemin en Haute-Loire, entre ordinateur et bétonneuse. «La maçonnerie est ma seconde passion. J'ai coulé toutes les dalles de béton et construit les pièces pierre à pierre», avoue cette Auvergnate d'adoption, que l'on croise néanmoins parfois chez Castel. Dans la foulée, elle confie ses intérêts à un agent littéraire, Pierre Astier, et, à la surprise générale, quitte son premier éditeur, le prestigieux POL. «Cela s'est très mal passé entre nous», élude-t-elle. Flammarion se met sur les rangs, mais elle rejoint finalement Héloïse d'Ormesson, qui mise gros avec elle.
Jean d'Ormesson, le père de son éditrice, qui a eu la primeur du livre, lui a glissé: «C'est très habile d'avoir utilisé le pastiche pour traiter un sujet aussi brûlant.» A l'image du Proust de L'Affaire Lemoine, elle signe un Houellebecq cruel, un La Fontaine succulent, un Perec et un Ravalec un peu longuets, à partir d'un fait divers. Mais quel fait divers! «Un matin où je buvais un café dans un bar de la Bastille, raconte la romancière, les gens au comptoir évoquaient un drame qui s'était déroulé la nuit précédente: un homme éméché avait obligé sa rencontre d'un soir à lui faire une fellation sous une porte cochère. Pour se venger, celle-ci mordit jusqu'à lui sectionner le membre. J'ai tout de suite pensé que cela ferait un formidable sujet.» Le Degré suprême... est une variation littéraire autour de ce thème scabreux - sans jamais que le livre sombre dans l'égrillard.
«J'ai découvert que Houellebecq était capable de faire passer les pires horreurs homophobes ou misogynes sous couvert de son écriture pseudo-scientifique.» Et, en effet, son «Restriction du domaine» (sic) reproduit très justement le ton houellebecquien et son utilisation caractéristique des mots en italiques. La dix-septiémiste a aussi particulièrement soigné La Fontaine et Tallemant des Réaux. «Mais, attention, je n'ai pas voulu faire un simple exercice de style. Il s'agit d'un livre politique, féministe, jure-t-elle. Mes femmes sont toutes des femmes libres.» Libres et surtout libertines. Même si aucune ne va jusqu'à poser dans Playboy...
Le degré suprême de la tendresse
Héléna Marienské
éd. Héloïse D'Ormesson
208 pages
19 €
124,63 FF
Rédigé par : TLACIAR | 10 janvier 2008 à 14:16
Donc votons pour Pivot. Ceci dit les prix de quoique ce soit sont dépassés, et fait tous les auteurs tronc. déjà que trop n'écrivent que pour le pis pôle.
Rédigé par : martingrall | 10 janvier 2008 à 09:10