Je vous laisse lire ce qui fait, aussi, la littérature...
Les rencontres, les textes, la picole et un sens de l'amitié!
Merci Jules pour ce moment si bien retracé, ton enthousiasme et ta perception du talent de Stefan.
Merci Stefan pour ce livre formidable qui n'est que le premier d'une très longue série, je l'espère...
Merci Éric pour nous avoir fait nous rencontrer mais j'attends ton bouquin avec impatience.
Stéfan Coïc... un Pennac en plus déjanté!
J’ai rencontré pour la première fois Stéfan Coïc tout à fait par hasard mais un heureux jour.
Je venais de Mandoriser le chanteur Renaud (voir le résultat là) et je m’apprêtais à quitter La Closerie des Lilas. Sur la terrasse du restaurant, j’entends quelqu’un m’appeler.
-Mandor, Mandor, hé ho !
Pour être tout à fait franc, je ne vous le cache plus, Mandor n’est pas mon vrai prénom.
Oui, je sais, c’est un peu dégueulasse de vous dire ça sans vous prévenir de poser votre popotin quelque part.
Rapport au choc que cela doit vous faire d'apprendre une nouvelle si majeure.
Donc j’entends quelqu’un m’appeler par mon vrai prénom.
-Jules, Jules, hé ho !
Je me retourne et vois un ami de longue date : Eric Genetet. Je l’ai connu à Strasbourg il y a 15 ans. Outre le fait que nous sommes très vite devenus potes, nous avons travaillé aussi dans la même radio. Il a sorti un livre il y a deux ans, Chacun son Foreman (que j’ai chroniqué en toute objectivité ici mais qui a eu d’autres critiques positives comme celle-ci).
Bref, il est à une table en compagnie de deux autres personnes.
Gilles Cohen-Solal, secrétaire général des éditions Héloïse d’Ormesson (autant dire que c’est le monsieur finance de cette maison qui est entrain de monter, monter…) et un autre homme que je ne connaissais pas.
Stéfan Coïc. Il m’est présenté comme un futur auteur maison (tout comme Eric qui devrait sortir un nouveau livre chez eux). Le truculent Gilles Cohen-Solal m’invite à m’asseoir à leur table et m’offre une coupe de champagne, ce qu’évidemment, j’apprécie vivement (car je suis un véritable pique assiette, mes amis vous le diront).
Stéfan m’affole un peu car il me noie de questions sur mon travail. Je n’aime pas parler de mes activités professionnelles en public. J’ai toujours peur de franchir la ligne détestable de la prétention. Je le fais sur mon blog, certes, mais j’ai l’impression de pouvoir maîtriser mes propos.
Donc, là, j’esquive.
Et du coup, c’est moi qui lui pose des questions. Ca, je sais faire.
En fait, Stéfan était entrain de fêter sa signature chez Héloïse d’Ormesson.
Voilà, j’ai rencontré ce type un jour heureux pour lui et j’aime ces sortes de hasards (qui peut-être n’en sont pas…).
Nous échangeons nos mails et numéros de téléphone respectifs.
Son attachée de presse, Anne-Laure, m’envoie quelques jours après les premières épreuves de son roman.
Et là, je prends une espèce de claque.
Un nouveau Pennac, en plus déjanté, est né (voir deux notes plus bas).
Le héros de Contravention s’appelle Adermatt Mac Dermott.
Présentation du personnage selon la maison d’édition :
« Il a la quarantaine immature et descend d’une dynastie de milliardaires excentriques où l’on se suicide de père en fils. À la disparition, dans la pure tradition Mac Dermott, de son géniteur, il est désigné tuteur légal d’un cadet, dont il apprend l’existence à l’occasion. Du haut de ses sept ans trois quarts, le petit Bristol hérite de la fortune familiale, tandis qu’Adermatt, lui, « hérite » des dettes de son frère aîné et des huissiers afférents. Mais ces péripéties l’affectent moins que le départ de Gladys, la femme de sa vie. »
J’ai lu cet « objet littéraire non identifié » goulûment, avec des sentiments mêlés de joie, d’émotion et de réflexion.
Là, je dis chapeau l’artiste !
Une histoire haute en couleurs avec tout plein de péripéties et de coups de théâtre parfaitement maîtrisés.
Un truc de dingue, une folie pure.
Les mots folie et pure sont à l’image exacte de ce roman à l’écriture exigeante et populaire.
C’est donc avec joie que je lui donne rendez-vous le vendredi 15 décembre dernier dans un restaurant de luxe de la capitale. Ne lésinons pas sur les moyens.
Hop ! Pizza Pino sur les Champs Elysées.
Je sais, je ne suis pas raisonnable.
Nous prenons deux pizzas et là… seule et unique faute du monsieur.
Désolé Stefan, mais refuser de prendre du Lambrusco pour accompagner un repas frugal (qui plus est, d'origine italienne), je ne sais pas comment on appelle ça.
Quoiqu’il en soit, magnanime, je n’en prends pas ombrage.
Le vin rouge en pichet fera l’affaire.
Je sors mon magnéto et Stéfan me fait la réflexion que, quand même, c’est un drôle d’endroit et une bizarre circonstance pour sa toute première interview.
Vrai.
Et je lui précise qu’à mon avis, si je suis son premier entretien, je ne suis certainement pas le dernier…
Foi de Jules.
Je lui demande de me parler de la tribu qu’il a inventé.
(A côté celle de Benjamin Malaussène fait pâle figure).
-Les membres de cette famille ne sont pas des hurluberlus contrairement à ce que tu sous entends. Ils ont un point de vue sur la vie qui leur est propre. Leur philosophie est de profiter de la vie. Pour eux, ce n’est qu’un jeu.
Mais ce roman baroque a ceci de particulier qu’il force à se remettre en question. Je me suis beaucoup interrogé sur ma façon d'envisager mon existence en le lisant.
Stéfan semble satisfait de cette constatation.
-Si tu as décelé la dimension philosophique du livre, je suis ravi. Le thème de mon roman est avant tout la réconciliation avec soi même, avec l’enfant qu’on a été et que l’on est toujours. Pourquoi un jour on ferme la porte, on arrête le jeu et on devient sérieux ? Le monde devient absurde alors que dans celui des enfants, rien ne l’est.
Encore une fois je cherche la part autobiographique de ses écrits.
Adermatt Mac Dermott n’a pas grand-chose à voir avec Stéfan Coïc, si ce n’est cette envie de retrouver cette âme d’enfant et un petit grain de folie.
-J’ai trois enfants et les voir évoluer me fascine. Avant de les avoir, je me sentais incompétent et j’avais peur de ne pas m’en sortir, de me tromper. Mon héros Adermatt est pareil. Mais la morale de mon histoire est simple. Si on se fait confiance, on sait tout faire.
Contravention est aussi un roman sur la liberté d’être soi.
Et Stéfan Coïc applique personnellement cette philosophie de vie. Il a tout lâché pour se lancer dans le métier d’écrivain.
Il m’interdit de dire ce qu’il faisait avant (pourtant métier fort honorable et qui explique pourquoi, à la lecture de ce livre, on imagine des images, tout comme dans un film… Je dis ça, je n’ai rien dit.)
-Quand on a envie de faire quelque chose dans sa vie, il faut s’en donner les moyens. Aujourd’hui, je suis plus riche de moi-même. Me lancer dans l’écriture n’a pas de prix pour moi. Je pense que tout ce que l’on nous raconte sur la valeur morale du travail est du leurre. Un vieux proverbe japonais dit : oser ne coûte qu’un instant d’embarras, ne pas oser, c’est être embarrassé toute la vie.
Il commence à m’ennuyer le Stéfan. Je vais devoir reconsidérer la façon avec laquelle je manie ma vie.
Je ne souhaite pas trop vous parler de ce livre en détail car il faut le découvrir presque « vierge » de tout à priori. Se lancer et se laisser porter par l’imaginaire de ce nouvel auteur dont je pense qu’on n’est pas prêt de ne plus entendre parler.
Il a écrit un roman avec de la vie à l’intérieur.
Ca bouge dans tous les sens, ça remue les tripes parfois et sourire beaucoup.
Très humain.
Et même si Stéfan Coïc n’aime pas le Lambrusco, ben, il m’a tout l’air d’un mec bien.
Ce qui me permet de constater que j’en rencontre pas mal en ce moment des mecs biens, qui écrivent des romans bourrés d’humanité.
Bref, des mecs qui me touchent et dont je me sens très proche.
Sinon, Contravention sort le 18 janvier prochain.
Faut un peu patienter, je sais.
Mais l'attente en vaut la chandelle.
Bien vivante la chandelle.
P.S: La photo du haut est signé par un photographe professionnel : Arnaud Février. Merci à lui!
Les autres photos de l'auteur et de l'intervieweur sont signés d'un photographe du dimanche: Mandor. Merci à moi!
Il est sorti?
Rédigé par : catherine | 19 janvier 2007 à 16:06