* Une marque déposée...
Après une critique de Pierre Assouline, voici une critique d'Éric Neuhoff...
Qui parle d'un écrivain important (littérairement parlant...!), lui...!
A consommer sans modération ( la critique et le livre de Martin Amis...!)
Pour le reste je voudrais dire à ceux qui pensent qu'écrire sur les critiques qui écrivent sur les critiques qui écrivent sur les agents qui parlent du milieu , ceux là je voudrais leur dire que je souhaite de tout mon coeur des jurys tournants, des critiques critiques, des auteurs auteurs, des éditeurs éditeurs et non pas ce formidable melting pot merdique où tout le monde tient tout le monde par la barbichette et qui n'a pour conséquence que de faire lire au public Marc Lévy, Florian Zeller ou Harlequin...!
Oui il me semble absolument nécéssaire de dénoncer la compromission qui régne à tous les niveaux dans le "milieu ""littéraire""!", absolument!
Pour le reste , il existe des critiques qui écrivent et s'interdisent pendant une année de publier la moindre critique sur un livre paru chez leur éditeur...cela me semble être parfaitement éthique si tant est que ce mot ait encore un sens dans ce milieu...
André Rollin du Canard Enchaîné est l'un de ces trop rares critiques, il me semble important de le dire d'autant que son livre sort le 11 janvier chez Sabine Wespieser il qu'il sera extrêmement facile de vérifier qu'il n' a qu'une parole et qu'il s'y tient...
D'aucuns seraient bien inspirés d'en prendre de la graine...
À bons critiqueurs, Salut!
Chien jaune de Martin Amis - traduit par Bernard Hoepffner avec la collaboration de Catherine Goffaux Gallimard, 500 p., 22,50 €.
L'enfant terrible des lettres britanniques publie un mauvais roman et un excellent recueil de chroniques littéraires. Au choix.
SON DERNIER ROMAN, qu'est-ce que c'était, déjà ? Ah oui, Train de nuit, ce pastiche de polar, en 1997. Après un détour par l'autobiographie et un essai sur Staline, revoilà Martin Amis sur le terrain de la fiction. Chien jaune ne dépaysera pas. Pas assez, du reste : on dirait qu'Amis s'autoparodie, qu'il pianote sur son ordinateur en bâillant («J'ai touché une avance faramineuse et de toute façon ça sera toujours assez bon pour ces cochons de lecteurs »).
Ce volume de fort tonnage dégage une vieille odeur de réchauffé. Le savoir-faire est toujours là, avec cette ambiance de fin du monde, ces villes crépusculaires et dangereuses, le stupre et la corruption qui sont partout. Les personnages sont affublés de noms bizarres. La femme du héros s'appelle Russia et elle est américaine (rires au fond de la salle). Une maîtresse chinoise se baptise He, ce qui en VO permet à l'auteur de jouer avec ce pronom masculin. Quant au majordome, devinez : il répond évidemment au doux patronyme de Love. À part ça, il est question de violence et de pornographie. Xan Meo, acteur et écrivain débutant - il vient de publier des nouvelles au titre clinquant, Lucozade -, est agressé dans la rue. Traumatisme crânien. Il ne se souvient plus de grand-chose, a tendance à régresser et à commenter doctement tout ce qui lui arrive. C'est le défaut du roman, cette sorte de GPS discursif qui accompagne tous les chapitres. Martin Amis montre l'action et il n'y a aucun problème. Hélas, il ne peut s'empêcher de la commenter, de lâcher des aphorismes frappés au coin du bon sens. En cela, il commet une grosse bêtise, car sa galerie de monstres, de tordus, avait de quoi allécher : le monarque fatigué qu'on essaie de faire chanter avec des photos de sa fille de quinze ans nue, un journaliste crapoteux de tabloïd, un gangster en Californie. Les histoires se tricotent sans nécessité réelle. Amis est obligé d'utiliser des ficelles indignes de lui, accidents, coïncidences. Pour prouver que le livre est profond sous ses allures vives et décontractées, on a ajouté une comète qui menace de frôler la planète et un avion qui ramène un cercueil en pleines turbulences.
Comme les passagers du vol malmené, on se raccroche à ce qui passe à notre portée, des phrases sur un bébé «avec ses premières dents du bas pareilles à des grains de riz jumeaux» ou sur une demoiselle : «Elle était chaussée de briques de vingt centimètres et portait des pattes d'éph en tipis». Sinon, mieux vaut oublier ce roman sur l'amnésie.
Des vacheries qui ne ratent pas leur cible
On se rattrapera avec le recueil d'essais qui paraît en même temps. On tombe d'un bateau et on trouve soudain que le canot de sauvetage est bien plus confortable. Il faut sauter sur ces textes qui sont du pur Amis. Dans ces articles, il parle de l'air du temps et beaucoup de littérature. Il en parle avec un brio, une agilité, une culture qui déclenchent un enthousiasme incontrôlable. Cela sert donc à ça, la presse anglo-saxonne, à imprimer ces morceaux de bravoure.
Ses centres d'intérêt sont vastes et variés : la brutalité dans le cinéma hollywoodien, l'écologie, le nucléaire, Elvis Presley (« Il est difficile, dans son cas, d'imaginer un personnage d'une banalité plus explosive »), mais surtout, surtout, les écrivains. Là, il est imbattable. Il a lu huit ou neuf fois Lolita (« un livre cruel sur la cruauté »), connaît Ulysse presque par coeur, considère que Les Aventures d'Augie March constitue le fameux grand roman américain. Pas bégueule, il plonge ses doigts délicats dans Thomas Harris et Michael Crichton, applaudit Elmore Leonard («un génie de la littérature»). Son approche des textes est à la fois précise et inattendue. Les formules réjouissantes ne se comptent plus. Des idées à la pelle, de l'admiration à revendre (Updike peut dire merci) et des vacheries qui ne ratent pas leur cible (Philip Roth comprend sa douleur). Terrible raclée pour Norman Mailer. Une critique commence par : « Le nouveau livre de Norman Mailer porte tous les signes d'un écrivain condamné à verser une pension alimentaire de 500 000 dollars par an. » Plus loin, à propos des Vrais durs ne dansent pas : « M. Mailer écrit à toute allure pour une raison bien connue. Quand, mais quand donc tous ses gamins grandiront-ils et toutes ses femmes se remarieront-elles ? » Amis a beau le démolir, c'est à Mailer qu'il fait penser. Même style de boxeur vicelard, goût commun pour la politique et la chair fraîche de l'actualité, un côté teigneux et une énergie qui laisse leurs adversaires sur le flanc. On n'ose songer à ce que le Martin Amis chroniqueur, un jour de grande forme, aurait pensé de Chien jaune. À notre humble avis, le match se serait terminé par KO.
Guerre au cliché, essais et critiques (1971-2000) de Martin Amis traduit par Frédéric Maurin Gallimard, 506 p., 27,50 € .
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