VOICI AVANT LA NOTE DU TENANCIER HABITUEL CELLE DE STÉPHANE DENIS - ÉDITORIALISTE AU FIGARO - PARUE CE MATIN.
ELLE COMMENCE PAR CETTE PHRASE :
"EN CE MOMENT, L'ÉDITION N'A PAS DE CHANCE AVEC LES HOMMES POLITIQUES"
BONNE LECTURE
À PLUS TARD
"En ce moment, l'édition n'a pas de chance avec les hommes politiques. À gauche, Jack Lang annule un livre de vacheries sur Ségolène Royal. Devant les protestations de l'éditeur, il fait valoir qu'il a parfaitement le droit de renoncer à un livre dont il n'a pas écrit une ligne. Cet aveu nous désarme.
Jack Lang d'ail leurs n'en est pas à son premier coup. Il y a quelques années, errant dans un couloir chez Plon, je tombai sur la dactylographie d'un entretien au magnétophone. De toute évidence, on préparait un manuscrit. Le généreux garçon qui s'y collait a quitté l'édition, gardons-lui son mystère. J'emportai quelques feuilles. Il s'agissait principalement de Lionel Jospin. L'ensemble était salé.
Quelques mois plus tard, Jack Lang ralliait Jospin, et le livre disparaissait aussi vite qu'il était venu. Peut-être est-ce le même qui a resservi pour Ségolène Royal, car je me souviens qu'il était parsemé d'autoconsidérations avantageuses sur Jack Lang, sa vie, son oeuvre. Dans cette hypothèse, le manuscrit baladeur a des chances de revenir à la première occasion, si Jack Lang n'obtient pas ce qu'il désire. Nous le suivrons à la trace chez les éditeurs à qui il n'a pas encore été proposé et, si tout va bien, nous devrions le voir ressurgir aux fraises, c'est-à-dire quand on composera le gouvernement.
À droite, le ministre de l'Intérieur a déploré, je le cite, que La Princesse de Clèves figurât encore au concours d'attaché d'administration. Le ministre n'a pas précisé par quelle oeuvre il eût aimé voir remplacée La Princesse. Nous en sommes réduits aux conjectures. Peut-être par aucune. « Je ne sais, a-t-il ajouté, si ça vous est souvent arrivé de demander à la guichetière ce qu'elle pensait de La Princesse de Clèves. » Eh bien, pas suffisamment. Ce doit être faute d'exemple en haut lieu. On ne peut pas dire que nous ayons un gouvernement de grands lecteurs.
À l'exception de M. de Villepin, qui est poète et même poète hermétique, ce qui ne gâte rien, et donc n'a pas de temps à perdre avec le roman le plus clair de notre littérature, les ministres m'ont l'air de partager l'opinion du plus brillant d'entre eux sur La Princesse de Clèves. Ils ont d'autres soucis en tête ; la gauche a pris à la droite le « leadership » (un mot anglais qui devrait leur faire plaisir) de la présidentielle, les pompiers tapent sur les CRS et la croissance égale zéro. Je remarque que, parmi toutes les questions posées aux candidats à l'Élysée, aucune ne se rapporte de près ou de loin à la littérature comme on le faisait encore sous Giscard ou Mitterrand. Il faut y voir un gage de sérieux. Enfin nous sommes débarrassés de ces histoires interminables et de ces gens inutiles dont on ne sait pourquoi s'encombraient les vieux birbes de la Cinquième triomphante.
Exception faite de la guichetière, qui passe peut-être ses journées à se demander si la princesse va coucher avec le duc, ou à se pencher sur le principe des trois unités dans les tragédies de Rotrou, la disparition de toute dimension littéraire va simplifier la vie publique et singulièrement la vie politique. Fini les auteurs de circonstances, les livres bidon, les biographies sur mesure, même les programmes et les manifestes. Ce que nous demanderons à un homme politique sera de se consacrer à sa tâche, un point c'est tout. Pour y arriver, c'est-à-dire se faire élire, il devra se concentrer sur le montant des impôts et les règlements scolaires.
Assez de fantaisie, fin du supplément d'âme. Évidemment, il y aura des conséquences. Renvoyée aux foyers qu'elle n'a jamais voulu abandonner, la princesse risque de se braquer. Mettez-vous à sa place. Depuis trois cents ans, elle reste sur le pas de la porte pour que des géné rations apprennent que la vie est faite de sentiments, mais que les sentiments ne sont pas tout dans la vie. Et voilà qu'on lui dit que tout cela est vieux, poussiéreux, inutile.
La franchise du ministre, trop longtemps attendue, ne lui laisse pas d'autre choix que la disparition. Elle se vengera. Réduits à eux-mêmes, les électeurs ne verront plus de raison véritable de choisir entre Pierre ou Paul. Je veux parler de ces raisons personnelles, intimes, qui n'en sont peut-être pas aux yeux des autres, mais qui bien souvent orientent notre choix. Des lectures mal contrôlées comme les dénonce le candidat UMP peuvent certainement mener à l'erreur ; un amateur de Balzac risque de suspecter la bonne foi du Château ; un lecteur d'Éric Neuhoff s'intéressera surtout à la longueur des jambes de ces créatures interminables que nous aimerions tous rencontrer au moins une fois dans notre vie.
Mais l'absence de lecture risque de conduire au désastre. Sans les vertus de l'imagination que seule développe la lecture, je vous assure que la candidate socialiste semble bien près du champion gouvernemental. J'ignore si la guichetière est syndiquée, mais je crains que, privée des 250 pages que Mme de La Fayette a consacré au problème, elle ne commence par déclarer forfait dans la douloureuse question de savoir si le ministre doit rester place Beauvau ou plaquer le gouvernement."
Il aurait pu écrire aussi sur tous ces politiques qui se targuent d'être réellement écrivains ou historiens (je pense que les livres de Lang n'avaient de toute manière pas cette prétention; biographies et romans innombrables, et on retrouve les mêmes, Bayrou, Giscard... il n'y a pas besoin d'aller jusqu'aux poèmes de Villepin!
Rédigé par : catherine | 24 novembre 2006 à 18:06
catherine,
je n'attends rien de vous je vous donne à lire ce que dit un journaliste de Droite sur l'édition et la politique que vous n'auriez pas lu ailleurs qu'ici, je le pense...
je crois qu'il est important de ne pas se confronter qu'à ceux qui partagent nos propres idées...
pour ma part aujourd'hui je ne sais plus si j'ai des idées politiques...
je sais que j'ai un certain nombre de sentiments mais que les choses sont tellemnt compliquées que je ne sais plus si j'ai encore des "idées"..
voilà, le principe est simple: dites ce que vous voulez , de la façon dont vous le souhaitez...
ce que cela vous inspire ou pas...
Rédigé par : gilles | 24 novembre 2006 à 16:52
Me voilà bien ennuyée, et je repense (je sors du blog de Guy Birenbaum) à la phrase de Sarkozy hier soir sur TF1 disant de Ségolène Royal : "surl es questions graves, elle dit attendre les idées des français pour en proposer une; sur les questions graves, c'est au président de proposer une idée" (en gros, hein, je nesuis pas Sarkozy).
La question que je vous pose est : comment (=qu'attendez-vous de nous) voulez-vous que nous régissions à cet article que vous nous soumettez (j'ai adoré la Princesse de Clèves adolescente, mais je ne l'ai pas relue, mais j'ai préféré 24h dans la vie d'une femme ensuite)
Rédigé par : catherine | 24 novembre 2006 à 16:43