Cette année, une fois de plus, EHO a été dignement représentée par ses auteurs au " Livre sur la place ", manifestation qui ouvre la saison des salons littéraires.
Nancy, ville des Goncourt et des Rossinot, reçoit bien et les auteurs y sont contents.
Il y a du monde, des acheteurs, des visiteurs curieux (dans les deux sens...) et aussi des éditeurs qui draguent honteusement ceux ou celles dont ils aimeraient bien publier le prochain livre...
Je fais partie de la seconde catégorie et interviendrai régulièrement sur ce blog pour vous raconter un peu la vie de l'édition et des livres.
Ce sera à vous de démêler le vrai du faux, l'info de l'intox...
Pour les choses plus sérieuses la Très Belle Héloïse écrira aussi régulièrement ici.
Vous connaissez donc maintenant le titre du film :
" La Belle et le Bête "...
Chaque année, ce premier salon donne une idée des tendances de la profession à commencer par qui "postule" pour le GONCOURT... !
Nous pouvons le dire ici sans crainte et sans mensonge, le postulant le plus insistant est... une marionnette des "Guignols" !
Pour le reste, il faut signaler l'excellent livre de Philippe P-V : " L'homme qui marchait avec une balle dans la tête " et qui mérite absolument le titre de "Révélation de l'année" décerné par le magazine Le Point. De plus l'auteur est un garçon extrêmement attachant et d'une modestie non feinte ce qui est somme toute assez rare dans ce milieu...
On voit aussi des groupes d'auteurs se former par affinité et cela, en général, à la grande crainte des éditeurs qui ont toujours peur que leurs poulains ne rejoignent une écurie concurrente.
Il y a les groupes de " bonnets de nuit ", les groupes de "fêtards" et les groupes de... " rien ", auteurs déambulant tristes et seuls dans la nuit nancéienne...ce qui a toujours un côté un peu pathétique car en général ce sont ceux qui ne signent aucun livre, ou pas grand chose.
Car c'est aussi cela être auteur, c'est faire l'apprentissage de l'humilité (en général ce n'est pas leur point fort... !) et admettre que ce n'est pas parce que vous avez trouvé un fou qui est d'accord pour vous publier que le public suivra et encore moins qu'il vous reconnaîtra avant même que vous ne soyez connu !
Car il est dur le métier d'auteur assis pendant toute la durée d'un salon à côté de Marc Lévy... Très dur même !
Imaginez un peu le calvaire que doit subir un être humain ayant mis des années et ses tripes pour écrire, puis être édité (c'est-à-dire travailler avec un éditeur), puis être publié et essayer d'être vendu difficilement, imaginez le calvaire de cet homme, ou de cette femme, honnête, intègre, vertueux et courageux surtout qui ne signe pas un livre pendant que le phénomène incarnant le marketing éditorial fait patienter les gens derrière des barrières tellement la cohue est forte !
Et pourtant, courageusement, il reste...
Moi je serais déjà parti depuis longtemps en criant au scandale, à l'imposture voir même à l'escroquerie !
Rien, pas un mot déplacé, une abnégation à toute épreuve, une dignité exemplaire, voilà quelles sont les qualités des vrais auteurs, ceux que nous publions par exemple, mais ils ne sont pas les seuls.
J'ai beaucoup aimé l'attitude de Léonora Miano, dont le très beau livre publié chez Plon connaît un joli succès, mais qui est peu connue du grand public et regarde ce cirque avec une touchante distance ;
j'ai bien aimé aussi le détachement de Michèle Halberstadt dont le très joli roman Café Viennois est publié par Albin-Michel et qui s'est rendu compte que l'on peut être une star de la production cinématographique et que les gens passent devant vous en disant " qui c'est celle-là ? "
Et puis il y a NOS AUTEURS, Isabelle ALONSO, exemplaire de disponibilité et de gentillesse, y compris pour les gens souhaitant simplement la prendre en photo parce qu'elle passe à la télé...
Pierre PELOT, probablement le plus grand écrivain actuel, le seul qui sache simultanément :
- raconter une histoire
- créer des personnages ayant une épaisseur psychologique et une humanité incontestables
- écrire dans un style parfaitement dosé de flamboyance et de maîtrise
- éveiller chez le lecteur ce besoin irrépressible de ne pas lâcher ses livres.
Si vous ne l'avez pas encore fait, lisez de toute urgence les deux derniers livres de Pierre, Méchamment Dimanche et L'Ombre des voyageuses et vous verrez pourquoi jamais je ne publierai Christine Angot et Florian Zeller !
Parce que lorsque l'on a la chance d'avoir comme auteurs aussi bien Viviane CHOCAS (Bazar Magyar est une pure merveille de subtilité et d'intelligence), Gérald TENENBAUM (Le Geste est tout simplement un des plus beaux livres sur l'amitié, l'amour et l'absence que j'ai lus depuis... que je lis) et Lucia ETXEBARRIA, sans oublier Marcus, Tim et la merveilleuse Cléa, lorsque l'on a cette chance-là (et je ne vais pas les citer tous (parce que bon, chacun son tour !)) on a tout simplement pas besoin, pour se faire plaisir, et essayer à vous, lecteurs, de vous faire plaisir, de vendre de la... lessive !
Voilà ce que j'avais à vous dire aujourd'hui, de retour de Nancy !
bon souvenir de nancy, mais bon, c'est ma région et les signatures y sont plus nombreuses qu'ailleurs.. beaucoup de détachement et d'ironie sont aussi nécessaires puisque les auteurs ressemblent quand même à des animaux dans des cages, même si les organisateurs et les attachées de presse font de leur mieux pour leur éviter la déprime..mais c'est vrai que l'humilité est importante et que tout salon est avant tout un grand moment d'humilité. J'ai aimé y parler avec Agnès Desarthe et Jeanne Benameur, dont les deux romans sont magnifiques, empreints d'une empathie non feinte avec les personnages, avec Marie Billetdoux et Laurence Tardieu...c'est ça aussi, les salons, des rencontres, même fugaces. Ceci dit, je n'ai pas eu la chance d'être dragué...je dois manquer d'intérêt ( encore une leçon d'humilité, lol )
jp
Rédigé par : jp | 23 septembre 2006 à 11:38
Cher Gilles,
Apparemment ce que vous décrivez si bien et avec humour est le sort qui m'attend, peu ou prou, dans un futur proche... je me vois bien dans le rôle de l'auteur assise à côté de la star aux files d'attente serrées... et je tâcherai de rester digne en vendant mes deux romans dans la journée. En mémoire de ce billet. De ne pas fuir en courant, ce qui est mon premier réflexe à l'idée de jouer au VRP de mon travail. Je resterai à mon poste, je me ferai la plus légère possible, je tâcherai de ne pas trop montrer qu'on a avant tout des doutes sur l'existence de son talent potentiel, si modeste soit-il. Mais finalement tout ça a peu d'importance si l'on n'a pas décidé de concourir au titre de meilleur écrivain de l'année, ou de se mesurer à des géants de la littérature. Et je n'ai jamais eu cette ambition, ce qui j'espère me protégera des plus cuisantes blessure d'ego. A part ça, merci de défendre si bien vos auteurs. On sent que vous les aimez! Ils en ont besoin, et ça réchauffe, rien que de vous lire.
Rédigé par : Gaelle | 20 septembre 2006 à 11:23
@ CB
nous aussi nous l'aimons bien ce cirque, d'ailleurs nous en faisons un peu partie...
Mais bon, de temps en temps il faut dire les choses, un peu...
Michel Tournier...formidable!
A bientôt
Rédigé par : gilles | 19 septembre 2006 à 16:46
Bonjour,
Personnellement j'ai bien aimé le ton de votre collègue (dont je n'ai pas bien saisi le nom) au café littéraire : il semblait en pleine forme pour descendre en flamme tout ce "cirque" comme vous le qualifiez vous-même. Un cirque que j'aime bien malgré tout. Avec par exemple M. Tournier, toujours fidèle au poste. C'est génial quand même !
Merci de votre présence à tous les deux.
CB
Rédigé par : Cyril Brumère | 19 septembre 2006 à 16:09
Joliment raconté, donne envie de lire les livres et de rencontrer tes auteurs.
quand j'étais en France je faisais partie d'une petite association qui organisait chaque année un festival sur la littérature populaire.
nous avons reçu des auteurs plus ou moins connus (plutôt plus que moins, c'était un petit festival) et plus ou moins aimables et disponibles (certains capricieux...).
le seul dont je me souvienne vraiment, tout réservé et d'une délicieuse gentillesse, modeste aussi, c'est Jean Claude Izzo. Il venait tout juste de publier son premier polar Total Khéops.
Une belle rencontre, inoubliable.
Rédigé par : céleste | 18 septembre 2006 à 15:04
Marvellous. Bravo. Keep up the good work.
.°
Rédigé par : Account Deleted | 18 septembre 2006 à 12:47