Aujourd'hui, au cimetière de bagneux, il y avait un monde fou.
Normal, tout le monde aimait Boris.
Voici la lettre que Daniel a eu le talent d'écrire et le courage de lire devant des centaines de personnes.
Boris peut-être fier de lui.
Ses fils sont à son image et à celle de leur mère Sylvie.
Beaux, bons, intelligents , courageux et surtout terriblement humains.
Je voudrais qu'il sache ici tout l'amour que nous leur portons à eux deux , Benjamin et Daniel mais aussi à leur mère, Sylvie, ainsi qu'à Georges et Alexandra.
Jusqu’à l’atterrissage, je n’y ai pas vraiment cru. Encore en traversant la porte « Arrivée », je me disais : ce n’est pas réel, tu fais un affreux cauchemar, mais ce n’est pas réel. Il allait venir me chercher à l’aéroport, puis me raccompagner à la maison. Et comme d’habitude, je l’apercevrai, avec ses yeux en amande, couleur chat, avec son sourire de gamin et avec son blouson trop long et jamais raccommodé. Comme d’habitude, nous rentrerions dans sa vieille Golf et il s’énerverait contre les chauffards du matin. Comme d’habitude, il m’aurait fait quelques jeux de mots plus ou moins réussis, ses dernières trouvailles, et comme d’habitude, nous aurions parlé ensemble du dernier match de foot. Arrivée à la maison, un baiser sur la joue, et on déjeune ensemble demain midi.
Mais il n’est pas venu. Il s’était endormi et n’avait juste pas voulu se réveiller. Il est parti comme ça, au milieu de ses rêves, entre ses livres et sa musique. Je l’imagine maintenant, et je le vois en train de ranger ses étagères pleines de pages, avec une symphonie de Beethoven en fond sonore. Il est heureux là où il est ; il est heureux et il nous couve de son amour immense : il nous couvre de pensées tendres et il nous offre sa générosité sans limites.
Dire qu’il a été un père extraordinaire serait bien en dessous de la vérité. Papa était d’abord un être exceptionnellement bon, bon jusqu’au plus profond de sa personne. Adoré de tous, donnant sans jamais s’économiser, il a toute sa vie recherché le bonheur des gens qui l’entouraient. Il a été le père que tout fils rêverait d’avoir et nous a transmis un amour sans nul autre pareil. Mais il était aussi quelqu’un d’extravagant. Tu m’as dit, maman, qu’il était « hors du temps » et je crois que cette image le décrit assez bien. Il revendiquait presque sa marginalité, était fier de n’appartenir à aucune mode, à aucune époque. C’était un inclassable.
Il s’en est allé très tôt, beaucoup trop tôt c’est certain, mais il nous a tant apporté, il a tant compté dans nos vies, qu’il a su enrichir nos cœurs : il y a semé son or et sa lumière et a contribué à nous rendre un peu meilleurs. C’est d’ailleurs ainsi qu’il aurait voulu qu’on l’honore : qu’on se souvienne de lui comme d’une belle âme, dévouée aux autres et porteuse d’un message pour nous tous. Ce message, c’est celui d’un espoir, l’espoir de continuer de vivre, d’aimer, de rêver, de donner, de rire, malgré cette plaie inguérissable qui s’est ouverte. Garder la tête haute et réussir à faire face. Je me souviens que peu de temps après la mort de sa mère, il m’avait dit que lorsque Benjamin et moi serions mariés, lorsque nous aurions chacun trouvé notre voie, il aurait le sentiment d’avoir accompli son devoir. Son bonheur, c’était de contempler le nôtre. Et même s’il n’a pas eu le temps de voir tout se réaliser, je sais qu’il était extrêmement fier de nous, et qu’il disait souvent que nous étions sa plus grande réussite.
Alors maintenant, nous allons tâcher d’être fort et de rester unis, maman, Benjamin, et moi, parce que ce n’est qu’ensemble qu’on pourra s’en sortir. Évidemment, cela va être très dur et très violent, évidemment nous n’allons jamais vraiment nous en remettre, mais nous nous devons de continuer, pour lui, pour ce qu’il était, et pour tout ce qu’il nous a laissé.
J’ai appris, pas plus tard qu’hier, qu’il avait l’intention d’aller vivre en Israël dans une ou deux années, de s’installer à Jérusalem pour réaliser son rêve de toujours. Que je sois à Tel-Aviv le rendait heureux par-dessus tout et à chaque fois que nous nous appelions, il me demandait des nouvelles du pays, de l’université, des amis, de l’appartement. Il voulait tout savoir.
Alors pour toi, pour trouver ma voie et pour poursuivre la tienne, je vais retourner en Israël dans quelques jours, et je sais que tu m’y accompagneras, que tu seras avec moi en chaque instant.
Je t’aime papa et je penserai toujours à toi.
Au revoir Boris, et toutes mes condoléances et pensées à ses fils et à Georges. J'ai travaille un moment à l'agence avec lui en 1995. Merci
Rédigé par : Lipka, Rosemarie | 26 octobre 2007 à 19:43
Je suis passée par là, la mort d'un père parti trop tôt.
Je comprends cette fierté et cette douleur.
Je souhaite de tout coeur à cette famille, à ceux qui restent de réussir à reprendre le dessus et de continuer à aller de l'avant.
Rédigé par : Elisabeth Robert | 25 octobre 2007 à 13:11
Je ne connaissais pas cet homme mais cette lettre est touchante. Cette lettre d'un fils à son père est poignante. Cet homme, mort trop tôt comme beaucoup d'entre nous, peut être fier de son fils et de cette famille unie. C'est beau, tout simplement. Merci de nous avoir fait partager ça.
Rédigé par : Nath | 25 octobre 2007 à 08:53